Lors de ses précédentes expositions, les sujets des tableaux de Adam Adach renvoyaient généralement à sa Pologne natale, quittée en 1989. Les images peintes, liées à un contexte historique, géographique, social ou familial s’imposaient d’elles-mêmes à notre regard dans un rapport évident à une mémoire collective.
Dans cette exposition intitulée « Morsure », Adam Adam nous offre un ensemble de nouvelles toiles aux thèmes variés. La Pologne n’est plus qu’un lointain souvenir et le Portugal devient le sujet principal comme ces petites toiles bleues intitulée Parloir et Peniche Fairy Tale qui évoquent les décors des carreaux de faïence (azuleros) qui ornent les intérieurs et façades de bâtiments.
Deux histoires, peut-être plus, semblent ici s’entremêler ou établir des connexions sans que l’on puisse déterminer véritablement le fil narratif. Histoires de vacances avec Quitter le continent, la fuite d’une famille sur la plage avant l’orage dans Retour précipité, des jeunes qui s’amusent dans Piscine, Headstand ou encore ces danseuses qui jouent avec leurs jambes, allongées sous un ciel bleu azur (Monotonous Dance).
Les autres tableaux paraissent plus énigmatiques avec la présence d’un serpent dans le tableau Morsure, qui donne le titre à l’exposition ; d’un âne, d’une tête qui jaillit d’un fond noir telle un vampire (Ego) et le mot « Kapital » qui envahit la surface d’un autre tableau.
La plupart de ces œuvres ont une référence précise, leur composition exploite des sources photographiques variées, trouvées ou prises par l’artiste, des écrits comme dans L’effort humain (titre d’un poème de Jacques Prévert) ou la lettre d’un prisonnier illustrée par un dessin, à son jeune fils.
Adam Adach part toujours d’une réalité et pourtant, il donne l’impression de vouloir la fuir – de se dérober par une peinture que l’on peut qualifier d’anti-naturaliste. Tel un « arrêt sur image », son monde fonctionne comme un souvenir insistant qui se matérialise par des touches de couleur désordonnées et dissonantes.
Avec une palette surprenante, il prend plaisir à juxtaposer des touches translucides à des touches de couleur vives ou complètement éteintes. Dans l’une de ses toiles, il n’hésite pas à travailler à la bombe – manière de revendiquer sa liberté et de s’affranchir d’une certaine tradition.
Souvent le sujet d’une stupéfiante banalité est esquissé par un pinceau furtif qui ne ménage pas la matière picturale, comme si la peinture se désagrégeait sous nos yeux et partait à la dérive. Le fruit défendu, avec ses taches rouges habilement réparties dans une dominante de vert et de gris mastic, exprime parfaitement cette impuissance de la peinture à se stabiliser. Telle une ébauche, elle illustre le pouvoir hypnotique de sa peinture, mais aussi les doutes de sa pratique.